Page 24 - Cahier école de la SRF 4
P. 24
À l’arrivée du numérique, les fabricants de logiciels ont misé sur l’économie de
personnel, arguant qu’on pourrait par exemple se passer des assistants
monteurs. On parlait d’ailleurs à cette époque de « montage assisté par ordinateur »,
comme si le travail des assistants se réduisait aux opérations techniques. Dans les
premiers temps, les machines coûtaient très cher et on ne pouvait pas toujours louer deux
postes de travail. L’emploi des assistants monteurs a donc chuté radicalement. Il y a même
eu une époque où on les faisait travailler de nuit : ils prenaient le relais du monteur sur la
machine. Malgré la réduction du coût des logiciels par la suite, le pli avait été pris et on
s’est habitué à l’idée que la présence de l’assistant n’était pas nécessaire en permanence.
C’est encore pire dans d’autres branches : les assistants monteurs son ont quasiment
disparu.
Pour le montage son, l’histoire est un peu différente. Le numérique s’est développé d’abord
dans la musique avant d’arriver au cinéma : par conséquent ce sont surtout des gens
venant de la musique qui sont devenus monteurs son. La qualité du son étant meilleure et
les possibilités technologiques offertes par les nouveaux logiciels plus nombreuses, les
monteurs son ont rapidement refusé de travailler dans des salles de montage bruyantes
et mal isolées. Et c’est normal ! Des lieux spécifiques dédiés au montage son se sont créés,
s’éloignant des lieux du montage image, qui eux pouvaient se trouver relégués dans
n’importe quel bureau ou cave ! Dans la majorité des écoles, les formations au montage et
au montage son se sont dissociées, ce dernier étant le plus souvent rattaché au son, source
supplémentaire de séparation, voire d’incompréhension, entre les professionnels de ces
deux métiers.
En ce qui concerne le mixage, l’évolution technologique a aussi permis des installations
moins coûteuses, multipliant les petites structures. L’éparpillement de ces structures et
donc la distance entre les lieux de montage et de mixage a encore éloigné les
techniciens les uns des autres.
Auparavant, les étapes de la post-production étaient balisées. L’arrivée du numérique s’est
accompagnée de nouvelles formes de workflow, soit une multiplication de différents
processus de travail : nouvelles caméras, nouveaux formats... La post-production est
devenue beaucoup plus compliquée à comprendre et à gérer pour les producteurs. Sa
gestion a été davantage déléguée au directeur de post-production et on observe
aujourd’hui que, souvent, les jeunes producteurs ne savent pas en quoi consiste
concrètement le travail après le tournage. Le rôle du directeur de post-production
peut être formidable quand il s’agit d’aider les gens à travailler ensemble, mais il arrive
souvent qu’il se charge lui-même de faire le lien entre les différentes étapes de la post-
production, ce qui affaiblit encore la communication directe entre les membres de l’équipe.
La dispersion géographique, la spécialisation induite par les nouvelles machines et les
difficultés croissantes de financement d’un certain cinéma sont les causes conjoncturelles
de l’éclatement des équipes, et expliquent en partie la difficulté que l’on a maintenant à
24