Page 62 - Cahier école de la SRF 4
P. 62
Baptiste Etchegaray
Dans Nocturama, on les voit notamment écouter plusieurs fois le thème de John Barry du
générique d’Amicalement vôtre.
Bertrand Bonello
Ça c’était un choix émotionnel pour moi. C’est le dernier morceau qu’ils écoutent dans le
film. La fin est proche. Et dans ce moment tragique, je cherchais quelque chose qui ramène
à l’enfance. C’est une madeleine. Le thème de John Barry est parfait. J’y ai réfléchi après
coup, à l’époque je n’avais que 7-8 ans, mais il y a une mélancolie dans cette musique, et
c’était assez gonflé d’avoir mis ça sur un générique de série commerciale.
Baptiste Etchegaray
Je vous ai demandé à chacun la séquence musicale la plus sexy. Pour Yann c’est Les
Prédateurs, de Tony Scott en 1983, et pour Bertrand Twin Peaks, de David Lynch en 1992.
Bertrand Bonello
C’est le rapport au mal qui est sexy dans cette scène. C’est l’interdit, là où il ne faut pas
aller. C’est une image de l’enfer, et on imagine que l’enfer c’est sexy. En tout cas, moi
j’imagine ça comme ça.
Yann Gonzalez
Il y a aussi beaucoup de danger dans Les Prédateurs de Tony Scott, parce que c’est un film
de vampires. Catherine Deneuve va finir par mordre et vampiriser Susan Sarandon. Ce qui
est très beau aussi, c’est le début de la séquence, où Catherine Deneuve commence à jouer
au piano et où elle raconte Lakme de Léo Delibes, qui est le morceau qu’on entend, une
histoire d’amour entre deux femmes. La manière dont elle parle, dont elle séduit Susan
Sarandon par la parole, quand la musique commence à arriver, ça donne toute son
intensité érotique à la séquence. Quand on voit ça à 15 ans, on devient un peu fou.
Question du public
Est-ce que vous avez eu des musiques que vous n’avez pas pu utiliser, qu’on vous a refusées?
Bertrand Bonello
Je voulais utiliser, pour le film que je suis en train de monter en ce moment, Le Chant des
Partisans, et les ayants droits ont refusé. C’est un très beau chant de la résistance, je trouve
dommage de priver les gens de pouvoir l’écouter. Et pour les choses trop chères, par
exemple, je voulais un jour un morceau instrumental vraiment inconnu des Pink Floyd, ils
ont demandé 100 000 €.
62