Page 55 - Cahier école de la SRF 4
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Yann Gonzalez
                  Bien sûr. Après, les scènes de groupe c’est toujours difficile. Ma grande hantise, ce sont les
                  figurants. Là, ce sont des figurants qui sont déjà prêts à jouer, il y avait une chorégraphe.
                  J’ai un peu du mal avec ces films où on entre dans une fête et on voit que ce sont tous les
                  copains du réalisateur qui sont là, qui ne dansent pas très bien. Pour moi, la danse au
                  cinéma est hyper importante et j’avais envie de gens qui dansent bien, que ce soit
                  festif, que ça raconte quelque chose d’aujourd’hui. Le film se passe en 1979, ce sont des
                  danseurs de Voguing, donc on a un tout petit peu triché sur l’époque, car le Voguing est
                  plutôt né dans le milieu des années 80, et en même temps il y a une résurgence du Voguing
                  aujourd’hui, donc j’avais envie de ça. Pour moi, c’était important d’avoir la bonne musique
                  dès le départ. On a cherché les droits très en amont. C’est un morceau qui s’appelle
                  Malaguena de Pico qui date de 1979, et que mon superviseur musical m’avait proposé. Je
                  l’ai trouvé entraînant, baroque, fou et il datait vraiment de l’époque à laquelle le film se
                  passe, donc c’était parfait. Il y a quelque chose de tragique dans ce morceau et de festif à
                  la fois qui me plaisait énormément.


                  Bertrand Bonello
                  En effet, la clé de la réussite ou de l’échec de ces scènes c’est vraiment la figuration. J’avais
                  fait des recherches sur le monde de la nuit, plutôt gay, où les gens sont assez familiers
                  avec cette manière de se mettre en scène. Saint-Laurent, 1972, le Sept, c’est avant tout la
                  mise en scène de soi. Et ça, il faut arriver à le reproduire sur un plateau à 10h du matin, car
                  ce ne sont pas des scènes qu’on tourne de nuit. C’est facile pour les deux premières prises,
                  mais quand on leur demande de s’y remettre à 15h, c’est plus difficile. Après, placer les
                  acteurs principaux au milieu de tout ça, finalement c’est assez facile. J’ai passé beaucoup
                  de temps en club, à regarder les gens danser. C’est quelque chose que je trouve hyper beau,
                  magnifique et émouvant. Et, à part dans Tiresia, dans tous mes films il y a quelqu’un qui
                  danse, parce que ça me provoque une émotion très forte. Encore aujourd’hui, si je vais
                  en club, je regarde les gens.

                  Je trouve que ce qu’il y a de plus difficile à retranscrire par rapport à la nuit, c’est ce
                  sentiment du temps qui disparaît. C’est passionnant de trouver la bonne durée et le bon
                  mixage ensuite. Je trouve ça très difficile à mixer. Pour Saint-Laurent, on a remixé ces scènes
                  au moins une dizaine de fois. J’ai dû dépasser le mixage de deux semaines. Quand ce n’est
                  pas assez fort, ça ne marche pas, quand c’est trop fort, ça fait clip, il faut trouver une
                  acoustique,  quand  la  caméra  bouge,  il  faut  changer  l’acoustique,  c’est  vraiment  très
                  complexe.

                  J’ai une grande collection de soul et northern soul, fin 1960 jusqu’à 1975 environ. Là, ça se
                  passe en 1972. Le Sept était un lieu qui commençait à accueillir du monde, c’était avant le
                  Palace. C’était une petite boîte noire avec des néons, on l’a reproduite à l’identique. Il y
                  avait ce DJ, qui a fini au Palace ensuite, qui s’appelait Guy Cuevas et qui importait des
                  disques des États-Unis, d’Amérique du Sud, etc,… C’était la première fois qu’on entendait
                  ces sons en boîte de nuit à Paris. J’étais donc attaché à faire écouter de la soul, et ce


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