Communiqué
20 janvier 2025
« Rien ne meurt jamais, le fleuve coule, le vent souffle, les nuages passent, le cœur bat. Rien ne meurt jamais... ». Ainsi se conclut Elephant man, le deuxième long-métrage de David Lynch.
Non, ce dernier n’est pas mort puisqu’il a inventé lui-même ce pays où le rêve et la réalité sont mêlés, où l’homme est relié au cosmos, où nos propres démons nous guettent dans le miroir. Il n’est pas mort puisque le cri de Laura Palmer résonne pour toujours dans nos consciences alertées, puisque la dame à la bûche aura toujours un secret à nous soumettre, puisqu’on ne trouvera jamais la clé.
Si David Lynch inspire depuis ses premiers films des générations entières de cinéastes, c’est qu’il a fait du cinéma une expérience sensorielle hors-norme, renouvelant sans cesse la forme, plongeant toujours au plus profond de nos âmes déchirées, offrant l’invisible à nos yeux éblouis. Personne mieux que lui n’a su retranscrire ses sensations, sa perception du réel dans toutes ses strates et sa complexité, usant de tous les genres, faisant parler les morts, les singes, les arbres... Cinéaste de l’intuition qui ne s’est imposé aucune limite, ses films échappent à toutes les classifications.
Guidé par une empathie profonde et viscérale pour ses personnages, il s’est fait l’écho des âmes meurtries d’une Amérique en décomposition. Il a fait sauter un à un les verrous d’une société bien-pensante, levant ainsi le voile sur son hypocrisie. De l’inceste aux féminicides, de la corruption aux abus de pouvoir, aucun tabou n’a su lui résister. Il n’a eu de cesse de dénoncer l’envers du rêve américain jusqu’à Hollywood même. Son œuvre nous rappelle combien le cinéma peut être engagé et inventif en même temps, et combien proposer de nouvelles formes reste un geste politique.
Pour garantir sa liberté de création, il est resté en marge d’Hollywood. Incarnation d’une jeunesse éternelle, radicale et sans compromission, il a préféré se tourner vers de nouveaux médiums plutôt que de se plier aux exigences d’une industrie aliénante et normative. Artiste complet, il n’a pourtant cessé de déconstruire son propre mythe, se décrivant comme un pêcheur d’idées qui cherche humblement à les restituer. Loin du créateur abusif et surpuissant, sa galaxie d’acteurs et de collaborateurs artistique et technique s’accordent pour décrire son humour, sa douceur et sa gentillesse. Quand on pense à David Lynch, on pense à Laura Dern, Kyle MacLachlan, Sheryl Lee, Angelo Badalamenti, Mark Frost et tant d’autres... Des complicités artistiques qui font rêver par leur fécondité et leur longévité.
Par sa manière poétique d’être au monde, David Lynch nous donne l’exemple d’un émerveillement sans cesse renouvelé, d’une foi intacte dans la puissance du cinéma, dans sa force d’évocation et de son expérience même. À nous aujourd’hui d’entretenir sa flamme.
Sa filmographie, profondément vivante, bouillonnante, nous n’avons pas fini d’en faire le tour. Jamais une œuvre cinématographique n’aura prêté à autant de fantasmes et d’interprétations, et nous continuerons d’en chercher la clé. Son exemple nous encourage à suivre notre intuition, à expérimenter et explorer toujours plus loin de nouveaux territoires expressifs. Alors laissons nous guider et filmons les yeux fermés, nous le retrouverons toujours dans nos rêves.
La Société des réalisatrices et réalisateurs de films
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