Communiqué de presse
Le 10 février 2021
Jean-Claude Carrière, l'auteur aux mille et une vies
« Un auteur doit chaque matin tuer son père, violer sa mère et trahir sa patrie » affirmait, non sans délectation, Jean-Claude Carrière en citant une fameuse maxime de Luis Buñuel, un des cinéastes avec lesquels il aura entretenu une des collaborations les plus insolites et vivifiantes que le cinéma ait connu.
De New York à Mexico en passant par Madras ou Téhéran, de l’écriture de scénario à l’exploration mythologique ou astrophysique, Jean-Claude Carrière n’aura eu de cesse d’embrasser avec une curiosité insatiable chaque mystère, chaque chimère et chaque énigme. Qui d’autre aurait su plonger pendant plus de dix ans dans l’inépuisable Mahabharata hindou afin de nous offrir, avec Peter Brook, l’histoire du monde dans toute son immensité cosmique ?
Pierre Étaix, Luis Buñuel, Milos Forman, Louis Malle, Jacques Deray, Marco Ferreri, Peter Fleishmann, Patrice Chéreau, Peter Brook, Volker Schlöndorff, Jean-Luc Godard, Andrzej Wajda, Nagisa Ôshima, Philip Kaufman, Jean-Paul Rappeneau, Jonathan Glazer, Philippe et Louis Garrel, Julian Schnabel, Luca Guadagnino… Autant d’univers singuliers dans lesquels Jean-Claude Carrière aura su se plonger avec toujours le même sens de l’aventure.
Dans un cinéma français qui aura souvent eu tendance à opposer l’invention du scénariste à la liberté du cinéaste, il n’aura cessé d’envisager l’écriture comme un exercice de camaraderie, comme une conspiration joyeuse et fraternelle.
Les portes de sa maison, qui avait pourtant dans un autre siècle fait office de maison close, étaient ouvertes aux quatre vents. Il y pratiquait avec chaque visiteur un art de la conversation aussi libre que généreux, déployant avec chacun son art du récit qui était au fond un art du partage. Il suffit de voir l’émotion suscitée par sa disparition pour mesurer à quel point Jean-Claude Carrière laisse aujourd’hui derrière lui mille et un enfants de cinéma.
Mais il n’y a pas de mort qui tienne. Jean-Claude Carrière continuera encore et toujours à nous rappeler que le monde est grand, que les civilisations et les cultures sont des territoires infinis, et que pour notre plus grande joie, notre curiosité ne sera jamais rassasiée tant que nous saurons la garder éveillée.
Jean-Claude Carrière restera à jamais le plus inspirant des fantômes de la liberté. Continuons à marcher sur son chemin de la voie lactée. En son honneur nous trouverons bien un pape ou deux à fusiller !
La Société des réalisateurs de films
Contact presse : Rosalie Brun /rbrun@la-srf.fr/ 01.44.89.62.58